vendredi 5 janvier 2018

Conditions de la réception tacite - Notion d'aléa dans une police décennale

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 21 décembre 2017
N° de pourvoi: 16-26.051
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
Me Balat, Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Boulloche, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Ortscheidt, avocat(s)




Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte au syndicat des copropriétaires de l'immeuble Les Terrasses de Termignon du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le liquidateur judiciaire de la société Christophe Cerizy et le mandataire ad hoc de la société Christophe Cerisy et associés ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 septembre 2016), que la société civile de construction Vente Merboul de Termignon a fait édifier et vendu en l'état futur d'achèvement des résidences de tourisme placées sous le régime de la copropriété, après avoir souscrit les assurances de dommage et de responsabilité obligatoires auprès de la société AGF devenue la société Allianz IARD (Allianz) ; que sont notamment intervenus dans la construction trois architectes, la société Atelier Cooperim, la société Cerisy et « le cabinet Claude X...& Michon Y... architecture », la société Cerisy et M. X...étant assurés auprès de la société Mutuelle des architectes français (MAF), la société Socotec, remplacée par la société Bureau Veritas, pour le contrôle technique, la société Ircadia assurée auprès de la SMABTP, pour lot maçonnerie, la société Seem, assurée par la société Aréas dommages, pour le lot cloison, la société Accourdo assurée auprès de la société MAAF, pour le lot VMC ; que, se plaignant de désordres, le syndicat des copropriétaires, après expertise, a assigné la société AGF devenue Allianz, qui a assigné la SMABTP, les sociétés Cooperim, Socotec, Ircadia, Cerisy, cabinet Claude X..., Veritas et MAF ; que les sociétés Ircadia, Merboul de Termignon et Cerisy ont été placées en liquidation judiciaire en cours d'instance ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes fondées sur l'article 1792 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, que les procès-verbaux de réception produits n'étaient pas signés par le maître de l'ouvrage et retenu qu'à défaut de paiement du solde des marchés, la simple prise de possession n'établissait pas la volonté tacite de celui-ci de réceptionner les travaux, la cour d'appel en a exactement déduit l'absence de réception de l'ouvrage ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes contre le cabinet Claude X...& Michon Y... architecture ;

Mais attendu qu'ayant relevé que, si certains documents comportaient un timbre humide ou un cartouche portant la mention « cabinet Claude X...et Michon Y... architecture », l'existence de cette structure n'était pas démontrée, la cour d'appel, qui, sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, en a exactement déduit que ses demandes formées contre une personne morale dont l'existence n'était pas démontrée étaient irrecevables, a légalement justifié sa décision ;


Sur le troisième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes contre la MAF, en sa qualité d'assureur de M. X...;

Mais attendu que, l'arrêt n'ayant pas retenu que l'intervention de M. X...dans l'opération de construction était avérée, le moyen manque en fait ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé :

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de condamner le Bureau Veritas à lui verser une certaine somme et rejeter le surplus des demandes formées à son encontre ;

Mais attendu que, le syndicat n'ayant pas soutenu devant les juges du fond que la clause limitative de responsabilité invoquée par la société Bureau Veritas était abusive ou contraire au code de la consommation, le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant, irrecevable ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société MAF, ci-après annexé :

Attendu que la société MAF fait grief à l'arrêt de la condamner en sa qualité d'assureur de la société Cerisy à payer au syndicat la somme de 1 750 000 euros ;

Mais attendu qu'ayant relevé, par des motifs non critiqués, que la société Seem n'avait pas été appelée à l'instance, que la société Aréas ne couvrait pas sa responsabilité contractuelle et que le maître d'ouvrage, dont il n'était pas établi qu'il avait les compétences suffisantes pour apprécier la pertinence du choix du procédé Styltech, ne devait supporter aucune part de responsabilité et souverainement retenu, se fondant sur le rapport d'expertise, que la société Cerisy avait sous-estimé et mal appréhendé les contraintes de ce procédé constructif et que, si la MAF lui faisait grief d'avoir sciemment laissé poursuivre les travaux en étant consciente qu'ils n'étaient pas conformes au permis de construire, l'imprudence de cette société n'avait pas fait disparaître l'aléa, faute de volonté de causer le dommage, la cour d'appel, qui a pu en déduire, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, que la demande formée contre la MAF, assureur de la société Cerisy, devait être accueillie, a légalement justifié sa décision ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Allianz :

Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation des contrats d'assurance souscrits par la société Merboul de Termignon, l'arrêt retient que les conditions particulières, aussi bien de l'assurance de dommages que de l'assurance de responsabilité, portent seulement mention de la cotisation, du montant de la garantie obligatoire et du montant des garanties complémentaires mais que le coût des travaux n'est pas mentionné ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions particulières du contrat d'assurance dommages-ouvrage n° 39507387 conclu le 18 janvier 2005 entre la société Allianz et la société Merboul de Termignon stipulent en pages 3 et 4 que le coût total prévisionnel de l'opération de construction est de 6 410 580 euros et que le contrat d'assurance de responsabilité professionnelle de constructeur non réalisateur n° 39507444, conclu le même jour, avait été établi sur la foi d'un questionnaire, produit par l'assureur, dans lequel l'assuré avait déclaré un coût total prévisionnel de l'opération de construction de 6 410 000 euros, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de ces documents, a violé le principe susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande d'annulation des contrats souscrits par la société Merboul de Termignon auprès de la société Allianz, l'arrêt rendu le 6 septembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry, autrement composée ;

Met hors de cause les sociétés Aréas dommages, Atelier Cooperim et BTSG, ès qualités de mandataire judiciaire de la société Atelier Cooperim, MAAF assurances et Bureau Veritas ;

Condamne le syndicat des copropriétaires aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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