mercredi 6 juillet 2016

Police RC fabricant - Notion de catégorie couverte; vendeur : obligation de délivrance

Note Malinvaud, RDI 2016, p. 478.
Note Pagès-de-Varenne, "Constr.-urb.", 2016-10,  p.27.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 30 juin 2016
N° de pourvoi: 15-12.447 15-22.690
Publié au bulletin Cassation partielle

M. Chauvin (président), président
SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Foussard et Froger, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Ohl et Vexliard, avocat(s)


--------------------------------------------------------------------------------


Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Joint les pourvois n° Q 15-12.447 et Y 15-22.690 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Caen, 4 novembre 2014 et 31 mars 2015), que, pour la réalisation d'une opération de construction portant sur plusieurs bâtiments d'habitation, la société Esnault, chargée des travaux de couverture, a posé des ardoises artificielles que lui avait vendues la société Ardosa, assurée auprès de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole Bretagne Pays de Loire (Groupama), cette société s'étant elle-même fournie auprès de la société Maxem, assurée par la société Axa France IARD, en responsabilité civile des produits, et la société Generali Belgium, en garantie du produit ; que la réception des travaux s'est échelonnée entre le 21 novembre 2001 et le 17 janvier 2003 et, en mai 2005, le syndicat des copropriétaires du Domaine du Vert Coteau (le syndicat) s'est plaint de désordres consistant en une décoloration de certaines ardoises ; qu'il a, après expertise ordonnée en référé le 16 novembre 2006, assigné le 14 novembre 2008 la société Ardosa et Groupama ; que la société Ardosa a appelé en garantie, outre son propre assureur, les assureurs de la société Maxem et le curateur à la faillite de cette société ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal n° Q 15-12.447 de la société Generali Belgium, pris en ses première, quatrième et cinquième branches :

Attendu que la société Generali Belgium fait grief à l'arrêt de retenir sa garantie et de la condamner à payer une certaine somme au syndicat, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges sont tenus de préciser le fondement juridique de leur décision ; qu'en retenant l'obligation à garantie de la société Generali Belgium sans indiquer la règle de droit fondant leur décision, les juges du fond ont violé les articles 12 et 455 du code de procédure civile ;

2°/ que l'aveu judiciaire n'est opposable à une partie qu'à condition qu'il soit fait par elle et en justice ; qu'en se fondant sur les écritures de la société Ardosa, et non celles de la société Generali Belgium, qui font état d'une attestation de garantie émanant de Generali Belgium, par hypothèse extrajudiciaire, les juges du fond ont opposé à Generali Belgium comme aveu judiciaire une déclaration non faite en justice et fondée sur les écritures d'un tiers ; que ce faisant, ils ont violé les articles 1354 et 1356 du code civil ;

3°/ que les juges du fond ne peuvent statuer d'office sur le moyen tiré de l'existence d'un aveu judiciaire sans provoquer les explications des parties ; qu'en décidant qu'un aveu judiciaire pouvait être opposé à la société Generali Belgium, sans provoquer les explications des parties sur cet aveu, les juges du fond ont violé l'article 16 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que les désordres affectant les ardoises consistaient en l'apparition de traces blanchâtres consécutives à des décollements de peinture et que la police souscrite auprès de la société Generali Belgium couvrait tout défaut grave et permanent d'aspect de la coloration, hormis le vieillissement naturel, et, d'autre part, que les factures des sociétés Ardosa et Maxem établissaient que les ardoises posées étaient de marque Syénit, que la société Ardosa avait adressé au couvreur l'attestation de garantie établie par la société Generali Belgium et que cette remise systématique d'attestation n'était pas contestée par celle-ci, la cour d'appel a pu en déduire, abstraction faite d'un motif surabondant, que les ardoises livrées relevaient de la catégorie couverte par le contrat souscrit auprès de la société Generali Belgium et que, le risque assuré étant réalisé, celle-ci devait sa garantie ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi principal n° Q 15-12.447 de la société Generali Belgium :

Attendu que la cassation n'étant pas prononcée sur les deux premiers moyens, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, du pourvoi principal n° Q 15-12.447 et sur le moyen unique du pourvoi n° Y 15-22.690 qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;



Mais sur le premier moyen du pourvoi incident du syndicat :

Vu l'article 1648 du code civil ;

Attendu que, pour déclarer irrecevables les demandes du syndicat formées au titre du bâtiment G, l'arrêt retient que l'action n'a pas été introduite à bref délai ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait jugé que les désordres ne relevaient pas de la garantie des vices cachés, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen du pourvoi incident du syndicat :

Vu les articles 1147 et 1604 du code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande formée contre la société Ardosa et son assureur sur le fondement de l'obligation de délivrance, l'arrêt retient qu'elle a bien livré les ardoises qui lui avaient été commandées et que l'attestation établie par la société Generali Belgium garantissant l'absence de défauts graves et permanents d'aspect de la coloration n'engage que cet assureur ;

Qu'en statuant ainsi, alors que les défauts esthétiques, notamment de coloration, affectant la chose vendue constituent un défaut de conformité engageant la responsabilité du vendeur pour manquement à son obligation de délivrer une chose conforme, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

Met hors de cause la société Axa France IARD ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les demandes du syndicat des copropriétaires du Domaine du Vert Coteau relatives au bâtiment G, condamne la société Generali Belgium, dans les limites de son plafond, à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 174 396,11 euros hors taxes, outre actualisation, met hors de cause la société Ardosa et rejette les demandes formées contre elle et son assureur sur le fondement de l'obligation de délivrance conforme, l'arrêt rendu le 4 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne la société Generali Belgium aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes

Aucun commentaire :

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.