jeudi 10 septembre 2015

Vente immobilière - devoir de conseil du banquier

Voior note Zalewski-Sicard, Gaz Pal 2015, n° 249, p. 31.

Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 30 juin 2015
N° de pourvoi: 14-17.907
Non publié au bulletin Cassation

Mme Mouillard (président), président
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. et Mme X... et M. Y... (les investisseurs) ont acquis de la SCI Plescop résidence Mary Flor, en état futur d'achèvement, divers biens immobiliers dans une « résidence-services » pour personnes âgées, qu'ils ont donnés à bail à la société Sermaf pour une durée de neuf ans ; que cette société ayant été défaillante puis mise en liquidation judiciaire, les investisseurs ont assigné en responsabilité la société Crédit industriel de l'Ouest, devenue CIC Ouest (la banque), et sa filiale, la société CM-CIC Agence immobilière Afedim (la société Afedim), qui leur avaient présenté le projet ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour retenir la responsabilité extra-contractuelle de la banque, l'arrêt, après avoir énoncé que les établissements de crédit proposant à leurs clients un investissement financier sont tenus à leur égard d'une obligation de mise en garde, sauf s'il s'agit d'investisseurs avertis, retient que le fait que M. et Mme X... soient ingénieur et cadre commercial n'en fait pas des investisseurs avertis, pas plus que M. Y... dont la qualité de loueur en meublé professionnel résulte de ce qu'il tient des chambres d'hôtes ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le banquier prestataire de services d'investissement n'est pas tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de son client, même non averti, s'il lui propose un investissement ne présentant aucun caractère spéculatif, ce qui est le cas de l'acquisition, en l'état futur d'achèvement, d'un ou plusieurs appartements dans une résidence-services pour personnes âgées en vue de leur location meublée à la société exploitant la résidence, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu l'article 1382 du code civil ;

Attendu que, pour statuer comme il fait, l'arrêt, après avoir relevé que la banque a remis aux investisseurs la plaquette publicitaire de la société Mary Flor faisant état d'un produit immobilier et financier insensible aux modes et aux fluctuations et vantant, outre le bénéfice d'une fiscalité avantageuse, la régularité des revenus locatifs garantis par un bail reconductible, retient encore que, même s'il n'est pas établi qu'elle était informée des difficultés rencontrées par la société Sermaf en 2006 et si les actes de vente en état futur d'achèvement et les baux ne garantissaient pas la régularité des revenus escomptés par les investisseurs, il n'est pas contesté que la banque n'a pas informé les investisseurs du risque que pourrait leur faire encourir une déconfiture du futur exploitant de la résidence titulaire du bail ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la banque n'était pas tenue de porter à la connaissance des investisseurs une circonstance connue de tous et dont ils pouvaient se convaincre par eux-mêmes, telle que la possible défaillance de la société locataire à payer régulièrement les loyers pendant une durée de neuf années, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;

Condamne M. et Mme X... et M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;


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