samedi 27 septembre 2014

1) Notion de contrat administratif; 2) responsabilité contractuelle et causalité

Note Ajaccio, Dictionnaire permanent « assurances », bulletin n° 239, novembre-décembre 2014, p. 4.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mardi 16 septembre 2014
N° de pourvoi: 12-20.765 12-25.294
Non publié au bulletin Cassation partielle

M. Terrier (président), président
Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° U 12. 20-765 et S 12. 25-294 ;

Donne acte à la Société auxiliaire de financement de l'énergie et de l'environnement (Saf environnement) du désistement de ses pourvois en ce qu'ils sont dirigés contre les sociétés Aquapoles, Allianz iard, ERSO, Europénne de cloisons, EGC, Provence travaux, Ateliers de la pierre et Betac ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 29 novembre 2011, RG. n° 09/ 01680)), que la société Aménagement de la Rostolane a fait édifier des immeubles collectifs et des maisons d'habitation dotés d'un système innovant de chauffage-climatisation par géothermie dont le fonctionnement devait être assuré par un équipement collectif de pompes à chaleur alimentées, depuis une nappe phréatique de faible profondeur, par trois forages ; que ce système de chauffage-climatisation, développé en partenariat avec la société EDF au titre d'une convention « Vivrelec », a fait l'objet d'une procédure de garantie dite « Aquapac », instruite par un comité éponyme composé de la société EDF, de l'Agence de l'environnement et la maîtrise de l'énergie et du Bureau de recherche géologique et minière ; qu'à l'issue de cette procédure, le projet, déclaré éligible au bénéfice du fonds de péréquation des risques géologiques et miniers géré par la Saf environnement, a fait l'objet d'une convention de garantie du 31 janvier 2001 ; que le système de chauffage, n'ayant pas donné satisfaction par suite d'un tarissement de la nappe phréatique, a cessé d'être exploité dès le premier hiver qui a suivi la livraison des immeubles ; que les consorts X..., acquéreurs d'une des villas, ont assigné la société Aménagement de la Rostolane, vendeur en l'état futur d'achèvement, la société Betac, maître d'¿ uvre d'exécution tous corps d'état des constructions et la société Axa assurances IARD, assureur dommages-ouvrage, en réparation des préjudices consécutifs notamment aux dysfonctionnements et à la cessation d'exploitation du système de chauffage-climatisation par géothermie ; que la société Aménagement de la Rostolane a appelé en garantie les divers constructeurs intervenus dans la conception et la réalisation des ouvrages de géothermie, ainsi que la société EDF et la Saf environnement ;

Sur la recevabilité examinée d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, des pourvois principal et incident n° U 12. 20-765, après délibération de la première chambre civile :

Sur le pourvoi principal :

Vu l'article 613 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le délai de pourvoi en cassation ne court, à l'égard des décisions par défaut, même pour les parties qui ont comparu devant les juges du fond, qu'à compter du jour où l'opposition n'est plus recevable ;

Attendu que la Saf environnement s'est pourvue en cassation, le 11 juin 2012, contre un arrêt (n° 560, Nîmes, 29 novembre 2011), rendu par défaut et, comme tel, susceptible d'opposition ; qu'il n'est pas justifié de l'expiration du délai d'opposition lequel n'a pu courir, l'acte de signification de l'arrêt n'indiquant ni l'ouverture de cette voie de recours, ni le délai imparti pour l'exercer ;

Que, dès lors, le pourvoi principal, formé prématurément, est irrecevable ;

Sur le pourvoi incident :

Vu les articles 550 et 614 du code de procédure civile ;

Attendu que l'irrecevabilité du pourvoi principal entraîne celle du pourvoi incident lorsque ce dernier a été formé après l'expiration du délai donné pour agir à titre principal ;

Attendu que la société Aménagement de la Rostolane a formé un pourvoi incident à l'encontre de la société Saf environnement, par un mémoire en défense déposé le 10 décembre 2012, soit plus de deux mois après que l'arrêt attaqué lui a été notifié, par acte du 12 avril 2012 ;

Qu'il s'ensuit que le pourvoi incident est lui-même irrecevable ;

Sur le cinquième moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane n° S 12-25. 294, pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant exactement retenu que les surcoûts constitués par les forages supplémentaires relevaient des garanties facultatives, la cour d'appel en a déduit à bon droit que la SMABTP était en droit d'opposer le plafond de garantie de ce chef ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de la société EDF n° S 12-25. 294, ci-après annexé :

Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, qu'une démarche qualité était mise en ¿ uvre conjointement par le maître d'ouvrage, le bureau d'études et la société EDF laquelle devait, en assistance au maître de l'ouvrage, l'informer des aléas inhérents à la ressource naturelle choisie par l'ingénieur-conseil à qui elle avait recommandé au promoteur de confier une mission de l'avant-projet sommaire à la livraison, proposer au promoteur l'offre la plus adaptée à son projet et s'assurer que l'offre élaborée par l'ingénieur-conseil fût adaptée au projet et souverainement retenu que la convention liant le maître d'ouvrage à la société EDF démontrait l'implication de cette société dans la faisabilité du projet de sorte que ses manquements avaient un lien de causalité déterminant avec la défaillance du système, la cour d'appel a pu déduire de ses seuls motifs que la société EDF avait engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société Aménagement de la Rostolane ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi incident de la société EDF n° S 12-25. 294, ci-après annexé :

Attendu que la cassation n'étant pas prononcée sur les premier et deuxième moyens, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Mais sur le pourvoi principal de la Saf environnement n° S 12. 25-294, après délibération de la première chambre civile :

Sur le moyen relevé d'office et débattu par les parties :

Vu l'article 92, alinéa 2, du code de procédure civile, ensemble la loi des 16-24 août 1790 ;

Attendu que si l'exception d'incompétence du juge judiciaire ne peut être soulevée pour la première fois par une partie devant la Cour de cassation, celle-ci peut relever d'office le moyen pris de cette incompétence ;

Attendu que l'arrêt a condamné la Saf environnement à garantir la société Aménagement de la Rostolane des conséquences dommageables de l'arrêt d'exploitation du système de chauffage-climatisation par géothermie équipant la villa des consorts Piezel, dans la limite de 78 892, 36 euros correspondant à la participation du fonds au financement d'un système de substitution, dans la limite pré-définie par la convention du 31 janvier 2001 ;

Qu'en se prononçant ainsi, quand la convention litigieuse ouvrant droit à un fonds de péréquation des risques géologiques et miniers alimenté par des deniers publics, géré par la Saf environnement, agissant alors comme mandataire de la puissance publique, à l'effet de promouvoir le recours aux énergies renouvelables, selon une procédure administrative, d'abord, de sélection des projets éligibles à la garantie puis d'indemnisation des sinistres basée sur un barème pré-déterminé couvrant, dans les limites d'intervention du fonds, extrinsèques au contrat, le seul financement d'un système de substitution à l'énergie géothermique, comportait des clauses exorbitantes du droit commun qui lui conférait un caractère administratif, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane n° S 12-25. 294 :

Vu les articles 1213 et 1147 du code civil ;

Attendu que pour limiter la garantie de la société Betac à la moitié de la condamnation prononcée contre la société Aménagement de la Rostolane du chef des désordres autres que ceux relatifs au système de chauffage-climatisation, l'arrêt retient que celle-ci n'est pas l'auteur matériel des malfaçons signalées par les consorts X...et qu'elle se retourne à juste titre contre le maître d'¿ uvre qui n'a pas pris les dispositions nécessaires afin que les entreprises soignent leurs prestations et remédient à leurs manquements et qui, partageant de ce fait la responsabilité avec les entreprises, doit en répondre pour moitié ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle n'avait relevé aucune faute à l'égard de la société Aménagement de la Rostolane, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le troisième moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane n° S 12-25. 294 :

Vu l'article 1147 du code civil, ensemble le principe selon lequel chacun des coresponsables d'un même dommage doit être condamné à le réparer en totalité ;

Attendu que pour condamner la société Y... et les consorts Y..., à l'exclusion des sociétés Géofore et EDF, à payer une certaine somme à la société Aménagement de la Rostolane au titre de ses préjudices personnels, l'arrêt retient que ces surcoûts relèvent de la seule responsabilité du bureau d'études Y... , la société Betac n'ayant pas eu en charge cette partie de l'opération ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait également retenu la responsabilité des sociétés EDF et Géofore dans la défaillance du système de chauffage-climatisation, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;

Sur le quatrième moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane n° S 12-25. 294 :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour limiter à la somme de 320 578, 96 euros le montant alloué à la société Aménagement de la Rostolane au titre de ses préjudices, l'arrêt retient que l'expert judiciaire, qui s'en est expliqué avec pertinence, les a évalués à cette somme ;

Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Aménagement de la Rostolane qui invoquait un préjudice financier résultant de la différence entre les coûts réels et les coûts d'objectifs établis par le maître d'¿ uvre, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le cinquième moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane n° S 12-25. 294, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 241-1 du code des assurances ;

Attendu que pour limiter à la somme de 55 199 euros la condamnation de la SMABTP in solidum avec les consorts Y..., l'arrêt retient que les surcoûts liés au sinistre décennal relèvent des garanties facultatives pour lesquelles l'assureur est en droit d'opposer le plafond de garantie ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si les sommes préalablement payées par la SMABTP indemnisaient toutes un préjudice matériel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi incident de la société EDF qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane ni sur le quatrième moyen du pourvoi incident de la société EDF :

DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi n° U 12-20. 765 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il :

- condamne la Saf environnement à garantir la société Aménagement de la Rostolane à hauteur de 78 892, 36 euros pour le compte des acquéreurs en l'état futur d'achèvement et dit que la Saf environnement sera garantie par M. Y..., la SMABTP et la société EDF dans la limite de leur part de responsabilité ;

- condamne la société Betac à garantir la société Aménagement de la Rostolane à concurrence de moitié au titre des autres désordres, soit la somme de 15 584, 48 euros ;

- condamne in solidum la société Y... ingénierie, Mme Z...veuve Y..., M. Olivier Y... et M. Anthony Y..., héritiers de M. Y... décédé, à payer à la société Aménagement de la Rostolane, au titre de ses préjudices personnels, la somme de 320 578, 96 euros et condamne la SMABTP, in solidum avec les consorts Y..., au paiement de cette indemnité, dans la limite de la somme de 55 199, 00 euros,

l'arrêt rendu le 29 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société Aménagement de la Rostolane aux dépens du pourvoi principal, les sociétés Betac, Géofore et EDF, la SMABTP et les consorts Y..., in solidum, aux dépens du pourvoi incident de la société Aménagement de la Rostolane et la société EDF aux dépens de son pourvoi incident ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

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