samedi 2 août 2014

1) Vente immobilière - dol; 2) assurances catastrophes naturelles - prescription - computation

Voir note Landel, Dictionnaire permanent « assurances », bulletin n° 239, août-septembre 2014, p. 17.

Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du mercredi 11 juin 2014
N° de pourvoi: 13-11.786
Non publié au bulletin Rejet

M. Terrier (président), président
Me Balat, Me Le Prado, SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2012), que par acte du 10 avril 2003, M. et Mme X... ont vendu à Mme Y... une maison d'habitation ; que des fissures étant apparues durant l'été 2003, Mme Y... a, après expertise, assigné les époux X..., leur assureur, la Matmut, et son assureur, la société Filia MAIF en indemnisation de ses préjudices ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action estimatoire en garantie des vices cachés de Mme Y..., alors, selon le moyen :
1°/ que l'aveu judiciaire fait pleine foi contre celui qui l'a fait ; que Mme Y... ayant elle-même fait valoir, dans un aveu judiciaire contenu dans ses dernières conclusions d'appel signifiées le 1er février 2012, que la « preuve indiscutable » de l'étendue et de la cause des vices cachés allégués résultait des rapports des cabinets Cebime et Saretec en date respectivement des 5 juin 2008 et 26 mars 2009, la cour d'appel, en considérant, pour déclarer recevable l'action engagée en mars 2011 par Mme Y..., que celle-ci n'avait pu mesurer l'importance des désordres et leur origine qu'à la lecture du rapport déposé le 31 janvier 2011 par l'expert judiciaire, a violé l'article 1356 du code civil ;
2°/ que l'arrêt ayant constaté, par motifs adoptés du jugement confirmé, que l'expertise judiciaire du 31 janvier 2011 avait seulement « confirm(é) le diagnostic posé par le cabinet Saretec et le cabinet Cebime » dans leur rapport respectif des 26 mars 2009 et 5 juin 2008, la cour d'appel, en considérant, pour déclarer recevable l'action engagée en mars 2011 par Mme Y..., que celle-ci n'avait pu mesurer l'importance des désordres et leur origine qu'à la lecture du rapport de l'expert judiciaire, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article 1648 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que Mme Y... avait engagé son action le 23 mars 2011 et retenu, par motifs adoptés, qu'elle n'avait pu mesurer l'importance de la gravité des désordres affectant le bien vendu qu'après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire le 31 janvier 2011, la cour d'appel, devant laquelle il n'était pas soutenu que la découverte des vices cachés allégués résultait des rapports des cabinets Cebime et Saretec des 5 juin 2008 et 26 mars 2009, a pu en déduire que l'action était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de les condamner à payer à Mme Y... la somme de 106 000 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que ne relève pas de la garantie des vices cachés le vice né d'une cause extérieure à la chose vendue ; que l'expert judiciaire, comme ses homologues privés avant lui, ayant conclu que les désordres survenus étaient la conséquence de la sensibilité des sols d'assise des fondations de la maison aux variations d'humidité, la cour d'appel, en affirmant, sans expliquer de quelle pièce versée aux débats elle tirait cette conviction, que les désordres étaient inhérents à la structure même du bâtiment, dont la fragilité aurait prétendument permis la survenance des désordres sous l'action de la sécheresse, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que seule la mauvaise foi du vendeur profane peut priver d'efficacité la clause de non-garantie stipulée par l'acte de vente ; qu'en affirmant que M. et Mme X... connaissaient, au moment de la vente, le risque encouru de voir les fissurations des façades se reproduire et s'amplifier, cependant qu'il ressortait des faits constants du dossier que les fissures apparues en 2001 étaient isolées et concernaient exclusivement le garage, et non pas la maison d'habitation, et qu'au moment de la vente encore, deux fissures seulement affectaient un pignon unique de la maison d'habitation, la cour d'appel, qui n'a ainsi pas caractérisé la connaissance qu'aurait eue M. et Mme X... des vices cachés allégués par Mme Y..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1643 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que selon l'expert judiciaire les périodes de sécheresse étaient les causes des désordres qui existaient avant la vente et pouvaient être rattachés à la période du premier semestre 2002, que leur extension et leur aggravation correspondaient à la période du troisième trimestre 2003, et retenu que les désordres étaient inhérents à la structure même du bâtiment dont la fragilité avait permis leur survenance sous l'action de la sécheresse, que les vendeurs n'avaient pas entrepris des travaux de reprise en sous oeuvre pour éviter tout risque ultérieur de nouveaux désordres, qu'ils soutenaient avoir traité les premières fissures puis colmaté et dissimulé les nouvelles fissures par la pose d'enduit sans pouvoir ignorer qu'il s'agissait d'un phénomène récurent dont ils n'avaient pas informé Mme Y..., la cour d'appel, qui a caractérisé la connaissance par les vendeurs de vices cachés antérieurs à la vente rendant le bien impropre à son usage, a souverainement déduit que la demande devait être accueillie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :

Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt de mettre hors de cause la Matmut, alors selon le moyen :
1°/ toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; que lorsque l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier ; que la Matmut, assureur des époux X... au titre des catastrophes naturelles, ayant été attraite en garantie par ces derniers consécutivement à l'assignation en référé expertise délivrée à leur encontre par Mme Y... le 10 novembre 2009, la cour d'appel, en fixant le point de départ du délai de prescription au 22 mai 2003, date de la parution au Journal Officiel de l'arrêté du 30 avril 2003 portant catastrophe naturelle, pour dire que la Matmut avait été attraite hors délai et la mettre hors de cause, a violé l'article L. 114-1 du code des assurances ;
2°/ qu'en tout état de cause, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; que, toutefois, en cas de sinistre, ce délai ne court que du jour où l'assuré en a eu connaissance, s'il prouve qu'il l'a ignoré jusque-là ; que M. et Mme X... faisaient valoir, dans leurs conclusions récapitulatives signifiées le 26 avril 2012, qu'ils n'avaient pas été informés par Mme Y... de l'apparition des vices allégués jusqu'à leur assignation en référé en 2009 et qu'ayant quitté la commune de Peypin en 2002, ils n'avaient pas non plus eu connaissance de l'arrêté du 30 avril 2003 portant catastrophe naturelle ; qu'en fixant le point de départ du délai de prescription au jour de parution au Journal Officiel de l'arrêté du 30 avril 2003 portant catastrophe naturelle, sans rechercher à quelle date M. et Mme X... avaient effectivement eu connaissance du sinistre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 114-1 du code des assurances ;
Mais attendu qu'ayant relevé par motifs propres et adoptés que la Matmut avait été attraite en 2009 devant le juge des référés, que les époux X... n'avaient pas donné suite à une précédente déclaration de sinistre faite en 2001 en s'abstenant de fournir les documents demandés et qu'ils avaient connaissance avant la vente en avril 2003 des désordres affectant alors la maison, la cour d'appel devant laquelle les époux X... n'avaient pas soutenu avoir formé une déclaration de sinistre au titre de la sécheresse de 2002 après l'arrêté de catastrophe naturelle publié en 2003, a exactement retenu que l'action formée par eux, en 2009, contre la Matmut, assureur au titre des catastrophes naturelles, était tardive et que cet assureur devait être mis hors de cause ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen, ci-après annexé :

Attendu que le deuxième moyen étant rejeté, le moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence du chef de l'arrêt qui met hors de cause la société Filia Maif est devenu sans portée ;


PAR CES MOTIFS :


REJETTE le pourvoi ;

Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;



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