lundi 23 juin 2014

Y a-t-il encore une prescription biennale en droit des assurances ?

Etude Mayaux, SJ G 2014, p. 1260, à propos notamment de l'arrêt suivant :

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 18 avril 2013
N° de pourvoi: 12-19.519
Publié au bulletin Cassation

Mme Flise, président
Mme Bouvier, conseiller rapporteur
M. Lautru, avocat général
SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Odent et Poulet, avocat(s)


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Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article R. 112-1 du code des assurances ;

Attendu qu'aux termes de ce texte, les polices d'assurance relevant des branches 1 à 17 de l'article R. 321-1 du même code doivent rappeler les dispositions des titres Ier et II, du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance ; qu'il en résulte que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 de ce code, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le fonds de commerce de boulangerie exploité par la société l'Epi d'or (l'assurée) a subi successivement deux incendies ; que la société AXA France IARD, assureur de ce fonds, a réglé à l'assurée des sommes relatives à ces sinistres ; qu'à la suite de la résiliation du bail commercial en raison de l'impossibilité de reconstruction de l'immeuble dans lequel était exploité son fonds de commerce, l'assurée a sollicité de l'assureur une indemnité complémentaire en raison de la perte d'exploitation et de valeur vénale du fonds ; que l'assurée a assigné l'assureur en paiement de cette indemnité complémentaire ;

Attendu que pour confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes formées par la société Epi d'or, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, qu'il est indiqué à l'article 7. 4 des conditions générales de la police multirisques professionnels souscrite par l'assurée, intitulé « Période au-delà de laquelle aucune demande n'est plus recevable », que : « Toute action dérivant du présent contrat est prescrite par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance, dans les conditions déterminées par les articles L. 114-1 et L114-2 du code. La prescription est interrompue par une des causes ordinaires d'interruption de la prescription ainsi que par : la désignation d'un expert à la suite d'un sinistre, l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception par nous-mêmes en ce qui concerne le paiement de la cotisation et par vous-même en ce qui concerne le règlement de l'indemnité. La simple lettre n'interrompt pas la prescription. » ; que l'assureur a donc reproduit l'énumération exhaustive des causes d'interruption de la prescription prévues à l'article L. 114-2 du code des assurances, lequel ne liste pas les causes ordinaires d'interruption et ne procède à aucun renvoi sur ce point au code civil ; que le contrat d'assurance énonce clairement la cause ordinaire d'interruption de la prescription biennale résultant de la désignation d'expert à la suite d'un sinistre, en sorte que l'assurée ne peut soutenir que le délai biennal ne lui serait pas opposable en raison d'une lacune de la police à cet égard ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de ses constatations que le contrat ne précisait pas les causes ordinaires d'interruption de la prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen et sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;

Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société L'Epi d'or la somme de 2 500 euros ;

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